dimanche 19 juin 2011

ART BASEL 42. (2011).

©FDM

La Foire de Bâle vient de fermer ses portes. Exit donc le cru 2011. La grande cérémonie de l'art contemporain réapparaîtra en juin prochain. On y retrouvera les mêmes grosses galeries d'art, celles qui contribuent à entretenir la cote des artistes reconnus et d'autres, plus jeunes, en provenance souvent de ce que l'on nomme la scène de l'art des pays dits émergents. Ces dernières années, le centre marchand de ces produits très courus que constituent les œuvres d'art s'est déplacé vers l'Asie. Les chinois sont désormais très présents et cette 42e édition de la Foire a accueilli quelques galeries du Moyen-Orient.

La demande du marché de l'art ne suffit toutefois pas à engendrer d'incontestables talents. L'art contemporain ici exposé tend souvent à répéter, redire, et semble bien se chercher. Notable à cet égard, l'omniprésence d'un "Pollock" que l'on voit réapparaître çà et là dans la foire : sous la forme d'une installation, incluant en modèle réduit une maquette ou reproduction d'un dripping (Robert Kusmirowski, Variations sur un thème de Jackson Pollock, 2011) ou sous les espèces encore de ce Blue Poles qui vous attend sur un stand. L'original, on le sait, se trouve en Australie, à Canberra. Celui qui est ici proposé, exhibé, offert est une réplique (« Ce n'est pas un Pollock »), mécanique et bien huilée. « Parfaite ». Bien trop parfaite.

L'art le plus contemporain sera ainsi parvenu à transformer certaines des œuvres d'un des peintres majeurs du XXe siècle en "croûtes" susceptibles d'orner votre salle à manger, votre bureau ou le hall du siège de votre entreprise.

À côté donc des valeurs sûres (les Picasso, Bacon, Tapiès, Miro, Rauschenberg ou Louise Bourgeois...) et d'artistes désormais confirmés (comme Anish Kapoor, omniprésent dans cette foire comme actuellement sur la scène internationale) ou d'artistes qui (telle Marlene Dumas) confirment leur importance, la jeune scène artistique donne fréquemment dans le Kitsch et le clinquant.

Les matériaux utilisés se veulent spectaculaires. Couleurs vives. Surfaces polies. Perles. Miroirs. Matières réfléchissantes. Textures brillantes. On navigue dans le monde des reflets et du « bling-bling ». Cet art se doit de BRILLER.

Une certaine esthétique internationale et décorative, très marquée par le design, se met ainsi en place, qui doit sans doute autant aux conseils avisés des nouveaux managers de l'art qu'aux goûts, au folklore et à certains habitus culturels des nouveaux arrivés. La culture chinoise contemporaine (qui apprécie avant tout les couleurs vives, les rutilances et les reflets) imposerait-elle peu à peu sa marque de fabrique ?

Et là, il faut bien le dire : trop de Kitsch tue le Kitsch. Sur certains stands, on n'a souvent plus qu'une envie, celle de prendre ses jambes à son cou..., de fuir ces bruyantes exhibitions d'objets, de reflets, pour retrouver - à quelques encablures de tramway - l'austère pureté des plaques d'acier de Richard Serra, le minimalisme d'un Brancusi et de son indémodable colonne sans fin (Fondation Beyeler). - Nous y reviendrons.

Dans cette Foire, et au détour des allées, j'ai aimé, beaucoup, passionnément, à la folie : les bleus de l'installation de James Turrell (Joecar Blue, 1968), si bien mis en valeur par les ombres projetées des visiteurs, le cœur machine à coudre de Louise Bourgeois (rouge et rose entre les cylindres bleus des bobines de fil destinées à le recoudre et repriser, Heart, 2004), les structures blanches, aériennes et squelettiques (faites de lettres comme suspendues dans l'espace) de Jaume Plensa, l'efficacité esthétique des slogans de Barbara Kruger (I thought you were someone else", 2008), le marbre blanc et dodu d'une petite figurine de Botero (1932), les fentes, trous, déchirures et brûlures des Fontana, Millares, Burri...

Et encore : un pantin articulé de Sophie Taeuber-Arp (1918), La Fontaine du papillon de Rebecca Horn (2011) : un liquide bleu s'écoule d'un entonnoir ; les ailes du papillon se mettent à vibrer. Ou ce film, ce très beau film - cadré, en permanence si bien cadré - de Lewis Baltz (Candlestick Point, 1984-1988).

Ou - mais comment ne pas en finir ! - l'installation-couloir biface de Dan Flavin : les tubes de néons colorés diffusent une lumière qui se transforme au fur et mesure de la progression du visiteur. La vision d'ensemble cède la place au gros plan. Et là tout bascule. On se retrouve dans un autre registre sensoriel. Tactile. Terriblement tactile.

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